Critiques du spectacle : Presse

"Gilbert sur scène":// Article de dominique-hélène


Critique publiée dans Bruxelles news No 655 et autres

Gilbert : un nom de coiffeur des années 50 ? Presque. Un étranger 100% belgo- belge avec un
accent traînant de la Belgique méridionale…. encore plus attendrissant que le bruxellois
pur et dur. Il faut donc se couper de notre 21e siècle au parler unifié et regarder en arrière
sans pouffer. Ouvrir les yeux et le coeur sur ce personnage indécis, mal fagoté, triste à
pleurer ou à mourir de rire tant il est coincé de toutes parts. Encerclé. Un enfant de 40
ans, tour à tour sérieux et hurlant de joie de mise, jouant à contre coeur la comédie des
faux-semblants.
solitude, travail à la con, les filles trop belles pour lui, à la Jacques Brel ou à la Forrest
Gump. Il est 100% identique aux autres et totalement inconnu à l’intérieur. Spectacle en
crescendo. Le jeu et les mimes restent constants, leur grammaire s’apprend vite et les
scènes au départ, estomaquantes de platitude sont de plus en plus justes, attachantes et
parfois cruelles. Question de poésie qui pousse comme une mauvaise herbe entre nos
pavés de bonhommie légendaire. Il déshabille ses histoires, dit sa vérité sans complexes
malgré les qu’en dira-t-on et malgré ses angoisses puis s’envole par-dessus les toits
comme s’il lisait Prévert ou contemplait Chagall. Fiction ou réalité ? Belle interprétation.
50 places, remplissez-les !


CRITIQUE DE ROGER SIMONS / CINEMANIACS.BE


Des fois , vous n’auriez pas rencontré Gilbert place Flagey ? Il rôde très certainement dans ce quartier des plus vivants de Bruxelles : Ixelles , là où se trouve le magnifique bâtiment construit dans les années 30 qui a appartenu précédemment à la RTBF , devenu aujourd’hui un centre culturel : « le Flagey » comme on dit couramment…
Si vous ne voyez pas Gilbert sur la place ou tout à côté, le long des étangs , rendez vous à trois pas : rue du Belvédère au numéro 20 , là où trône Le Théâtre Littéraire de la Clarencière dirigé par Fabienne Govaerts.

Là , vous découvrirez Gilbert…en scène !
Il s’agit d’un monologue – un « seul en scène » ( comme on dit aujourd’hui ) écrit par Yves Hunstad et créé à l’Atelier Ste Anne – il y a une vingtaine d’années- par son auteur.

Le voilà joué maintenant et mis en scène par Jeremy Gendrot, jeune et talentueux comédien – en sortie de l’Insas il y a quatre ans.
Il fait tout dans ce spectacle : l’interprétation, la mise en scène, la scénographie, la lumière, la régie , mais aussi la production, la distribution, la vente de son spectacle…. Plein d’enthousiasme , il veut tout assumer et il y réussit merveilleusement bien.

Gilbert est un homme ordinaire , comme vous et moi…

Jeremy Gendrot : Il est Bruxellois , on le devine à son accent. Il parle et se raconte : son boulot , son vélo… pliable, le mariage de sa cousine, la manche sale de sa chemise ou la tâche sur sa cravate , les trous dans ses chaussettes , la crotte de chien qui colle à ses semelles…
Ainsi, par petites touches, se compose un tableau formé d’une multitude de détails d’importance : la vie qui passe si vite , la mort qui vient frapper à la porte la nuit , le désir d’amour , la rage de ne pas pouvoir donner…
Apparaît alors un miroir dans lequel chaque spectateur peut s’apercevoir et même se reconnaître !

Gilbert : Ca fait quand même du bien de rire un peu…Si on pouvait rire un peu comme ça tous les jours … Non mais , je sais pas mais plus tu avances de moins en moins tu ris..C’est triste hein …
Je trouve que ça devrait être le contraire. Mais sais pas pourquoi mais j’ai l’espoir…

Jeremy Gendrot est tout à fait remarquable tant dans la façon de jouer le texte que dans ses gestuelles du corps et du mouvement de ses yeux.
Il se fond avec talent et souplesse à l’intérieur du personnage de Gilbert. Il le fait avec pondération, intelligence.Il impose Gilbert. Il EST GILBERT ! Il le tient à bout de bras, à bout de mouvements, à bout de texte.
Il nous fait rire et nous émeut souvent.
Il a aussi inventé ce qu’il appelle « le jeu du son ». En fait , il parle à voix basse , collé au micro- il murmure plutôt- un texte volontairement inaudible.
Chaque soir , le spectacle est différent selon ce qu’il ressent ou selon les réactions du public.
Du bel ouvrage porteur qui touche les spectateurs.
Notre spectatrice attitrée, Mijanou , a beaucoup aimé ce spectacle. Elle vous communique avec joie ses impressions.
Mijanou Loosen : J'étais impatiente de revoir "Gilbert sur scène". En effet, il y a environ 20 ans, j'avais découvert cette pièce fantastique, à sa création, jouée par son auteur : Yves Hunstad. J'en avais gardé un souvenir émerveillé. Le Gilbert 2 que je vais découvrir n'a pas pris une ride (moi bien par contre !) et le texte, comme le personnage , sonne plus vrai que jamais.
Qui ne connaît pas au moins un Gilbert dans son entourage ? Les Gilbert se suivent et ne se ressemblent pas; mais ils appartiennent bien à la même famille. Ce Gilbert 2 n'est plus un vrai Bruxellois, mais il reste bel et bien belge, un de nos concitoyens donc. Nous avons pu le croiser dans la rue, ou à la mer du Nord, ou au café du coin. Comme ce personnage est attachant, pathétique, attendrissant !
L'évocation est si forte que nous, spectateurs, nous sommes tour à tour à côté de lui, dans son bureau, au bistrot, à la noce, et dans sa chambre (caché dans un placard, peut-être ?) témoin de sa pathétique solitude.
A travers ce décor nu, je vois si bien, la mer du Nord déchaînée autour d'un pédalo égaré et ce fameux tram " dansant"... c'est là toute la force de cette superbe création.
Longue vie à Gilbert !
PS : j'adore quand il devient nerveux !
moi aussi…Merci Mijanou .

Collaboratrices directes de Jeremy Gendrot :
Marie- Claude Van Lierde : improvisation vocale,
Anne-Marie Loop : regard extérieur.

Je vous recommande vivement ce spectacle et si vous vous y rendez , je vous conseille – après le spectacle d’une durée de 80 minutes environ- de bavarder quelques instants avec Jeremy Gendrot. Il vous expliquera avec enthousiasme et éloquence le travail qu’il veut apporter au théâtre. C’est très intéressant .
Son but est également de jouer ce spectacle dans tous les lieux possibles et mêmes en « appartement » ( comme le faisaient – il y a quelques années- Bernard Damien – et plus récemment Philippe Vauchel).
C’est une très bonne idée comme celle de le vendre pour une soirée à un groupe privé ou à l’occasion d’une fête !
Il est plein d’idées qu’il va mettre en chantier au fil du temps.

(Avec des extraits de propos publiés dans le programme du théâtre ainsi que les impressions de Mijanou Loosen)
Roger Simons,